367. Passager (8/10)
Et c’est une course-poursuite. L’homme sort une arme à feu de la doublure de sa veste, un objet improbable, chimère de pistolet à amadou, de colt et de visée à infrarouges. Seule l’arme les sauve pendant un temps, des ombres qui glapissent à leur odeur, des mâchoires qui arrachent le vide, de ces espèces de visages qui ne ressemblent à rien. Un moment, le Passager se retrouve à terre, des griffes plantées dans l’épaule, un souffle sur son oreille, et sert déjà son goût de peau sur un plateau d’argent.
Un nouveau coup de feu, l’un des derniers, dégage son prédateur dans un éclair de fumée, d’autres accourent pour leur part du gâteau, et tous deux reprennent leur marathon. Le cimetière défile, arbres, arbustes, buissons tordus par le feu, des flaques nauséabondes reliant les autels, le soleil fléchit, ralentit comme ils détalent encore, évitant des massifs de crocs pour tomber dans un traquenard, des toiles tendues se révèlent vêtements en loques, et toujours le second Passeur entraîne son client, déboîte presque son bras meurtri qu’il ne lâche pas, son silence ne répond qu’aux hurlements de l’autre, une main en avant pointant son tube d’acier, et les grilles s’approchent, reculent, jouent une valse étrange au fil du sentier qu’ils ne peuvent quitter, au risque de se retrouver l’un d’eux.
Le Passager commence à penser qu’il ne doit plus guère rester de balles, et pourtant son guide n’a pas rechargé. Les éclairs jaillissent encore, faisant plier les échines ou déchirant les toisons.
A quelques mètres de la grille, ils sont encerclés.
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