343. Passager (3/10)

« Le temps ici est un phénomène de bascule, reprend le Passeur. Difficile de le comprendre comme ça, mais vous comprendrez. Bientôt. La marée monte, ils ont fini de toucher aux engoulevents, ils engraissent sur leurs épaves. Ils préfèrent le jeûne. C’est le signe de votre départ. »

Sa silhouette grossière se confond avec un monde arrondi par l’obscurité. Une stèle devient son dos, redessine un ex-voto avant de découper une ligne d’arbres bas. Le Passager peut sentir sa cervelle bouger comme une éponge dans l’ivresse des grandes profondeurs. « J’étouffe un peu, dit-il, massant sa gorge, un goût de poussière montant le long.

– Il va faire chaud, cette nuit. Exceptionnellement chaud. Vous devriez cependant vous couvrir.

– Que voulez-vous dire ?

Un sifflement bas lui répond, suivi par une cavalcade en sourdine. L’air amplifie les volumes : il aurait dit que de grandes masses se déplacent ignominieusement vite. Avec une souplesse de monstre total. Une envie de vomir le prend.

– Venez, dit le Passeur. Votre porte vous attend.

Il sort une petite fiole sans éclat.

– Buvez ceci. Pour une longue marche.

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